Ce n'était pas la morsure du Soleil qui faisait souffrir Baïbars, le Lion de l'Islam, l'Arbalète, le vieux guerrier aux yeux perçants. Lui qui avait affronté cet ennemi tant et tant de fois, depuis les plaines d'Anatolie jusqu'au port du Caire, traité en esclave avant de devenir Sultan des confins des vestiges de l'empire Ayyoubbide jusqu'au première lueur maroccaine. Oui, tant de fois il l'avait affronté, la honte. Mais l'Histoire semblait prendre un malin plaisir à le torturer. Il y a treize ans, il était déjà là, à défendre les terres maures contre l'envahisseur Espagnol et infidèle. Il était déjà là, seul face aux hordes de l'infâme Emir Ibn Allah Jouah.
Il avait parcouru les steppes infinies de l'Europe pour porter le message de la victoire de la traîtrise et de la lâcheté. Du dédain, voilà ce qu'il avait amassé. On lui avait fermé portes et herses au nez.
Et l'infâme Emir prenait un plaisir infernal à le torturer, à l'humilier et à se gaver dans le faste de ses palais tandis que personne ne se souciait du démon qui l'habitait. Et il était devenu Roi. Baibars avait choisi l'exil, rentrant se terrer dans les terres du fin fond d'Arabie, dans la forteresse de Masyaf.
On avait fait appel à lui une deuxième fois pour défendre les couleurs du Maghreb. Et une deuxième fois il faisait face au démon. Au démon couronné qui allait finir par s'asseoir sur le trône d'Europe, Empereur d'Espagne, comme l'Emir avant lui.
Par deux fois, il avait été trahi, trompé et humilié. Cette fois la morsure était trop grande. Mais jamais il ne s'agenouillerait, lui qui avait juré qu'il ne serait pas sujet de ce Roi. Finalement, mieux valait la mort que la souillure éternelle. Tout était perdu et en ruines. Il était d'un autre temps.
Les ordres étaient donnés, il irait mourir à la rencontre du futur roi. Il se dirigeait droit sur Siljmassa et y mourrait, laissant sa dynastie y veiller pour l'éternité.
Arda para subire, brûle de t'élever