Septarion profitait de la fraîcheur de la nuit dans les jardins. La nuit avait été si douce. Pourtant, il restait encore une âme à punir dans cette cité de pêcheurs. Le Prince Maudit avançait, foulant la terre et les fleurs, les jeunes pousses et les récoltes. Derrière lui, les guerriers silencieux suivaient de leur foulée les sombres desseins de leur seigneur.
Septarion posa ses mains sur les frêles épaules de la femme qui lui tournait le dos. Il se baissa et lui caressa doucement la joue. Puis sa main descendit doucement jusqu’à atteindre le blanc cou. En voyant les tremblements de sa proie, Septarion siffla doucement.
« Il n’est pas sage de réveiller les morts. Pointe seulement du doigt l’endroit où ton seigneur de frère et maître se cache, et j’oublierai peut-être tes monstrueux secrets. Rassure toi, je ne suis pas l’envoyé de Dieu. »
Nul mouvement, nul soupir ne traversa la nuit. Les yeux du Prince pétillèrent de colère lorsqu’il égorgea sa victime. Il fit un simple signe en arrière et tous ses hommes s’arrêtèrent. Doucement, les arcs se bandèrent et le servant alluma une par une les pointes des flèches soigneusement enroulées dans du chiffon imbibé. Le bras de Septarion s’abaissa vivement et les jardins s’illuminèrent d’un nouveau jour. Toute la végétation millénaire des jardins d’Olynthe, partie en fumée en quelque instant à peine. Et Septarion ne se détourna de ce carnage que lorsqu’il était possible d’apercevoir une silhouette humaine se débattre dans les flammes, sous l’olivier.
La nuit avait été rouge et rouge serait désormais le règne de Septarion. Les Faucons d’Outremer avaient pris leur vengeance sur le maître qui les avait envoyés à la mort. Cette nuit-là, nulle âme ne vit le jour et à leur départ, les Faucons ne laissèrent rien qu’un tas de ruines fumantes sinon un étendard. L’aigle de Sable de la maison de Lyndorf flottait triomphalement sur le donjon de la cité alors que chacun pouvait lire en toute lettre sur la porte d’Olynthe…
« Certains sont nés pour de doux plaisirs, d'autres pour la nuit éternelle »
Au lever du Soleil, la Macédoine était désormais la propriété exclusive du Prince et de ses faucons. Nul repos pour les damnés.