Ça n'est pas arrivé si souvent que ça, mais pour cette fois, je suis bien d'accord avec Bricec
Ça fait quelques années à présent que je n'ai pas eu la possibilité de refaire une partie avec vous tous, victime d'une sorte de loi de Lenz ludique (le courant induit tend à s'opposer aux causes qui lui donnent naissance, ça s'éclairera dans la suite du message). Mais quand je repense à G&P, et ça m'arrive assez souvent, s'il y a bien entendu quelques parties qui me viennent en tête, il y a surtout des rencontres. En ligne. IRL. Brèves ou durables ; marquantes, pour pas mal d'entre elles.
Dans le désordre : G&P, bien sûr, c'est le jeu. C'est recevoir une proposition d'Orcrist, trop belle pour être vraie, savoir qu'il va me b... m'entourlouper, me jurer « pas cette fois ! » et me faire entourlouper quand même ; c'est constituer une grande alliance fidèle jusqu'à la mort, avec Marmont, Longarn et de Kerguezec, qui m'apprendra les rudiments du html pour faire des gazettes ; c'est constituer une grande alliance pourrie jusqu'à la möelle, monter à l'intérieur de l'alliance un cercle interne occulte, et à l'intérieur du cercle occulte, créer la Cour Secrète des Arcanes, pour comploter avec Jeemde. C'est me faire prendre de haut par un petit nouveau un peu prétentieux (coucou Athys de Saint Aignan !) et lui montrer que le vieil Alzgard a encore quelques tours dans son sac. C'est voir Guronce de Lix inventer à chaque partie une stratégie différente. C'est faire de la diplo-RP dans un sabir pseudo-italien avec mio fratello Ozric.
G&P, c'est aussi la communauté en ligne. C'est m'engueuler avec Bricec sur le forum, sur la question de l'existence d'un savoir objectif ; c'est passer la moitié de la nuit à faire monter mes scores sur le quizzbot installé par Ilmir sur le chat IRC, pour faire enrager Ykar le lendemain matin. C'est l'entraide, avec le rôle d'aide de camp, qu'avec d'autres j'ai pu assumer pendant un temps. C'est rire avec Scytal de sa dernière boulette (banqueroute, félonie involontaire, attaque sur la mauvaise terre, oubli de passer ses ordres, ce qu'il appelait ses « instants yaourt »). C'est débriefer avec Silent Requiem le sale coup que je lui avais joué sur une de ses premières parties (pas super sympa de ma part, merci de l'avoir bien pris, Silent !).
G&P, c'est les IRL. C'est aller écouter du jazz avec Médicis après la fermeture de l'Académie de la Bière, avant de finir la nuit au Highlander, à vider des whiskies avec Arthus Braveheart (pour me réveiller ensuite au terminus du RER en ayant raté mon arrêt, le reprendre dans l'autre sens et... me rendormir une nouvelle fois !). C'est partir en virée à Bruxelles avec CFH, et y retrouver Rodrigue, qui m'appelle « le Rat », et Lénaëlle pour goûter les gueuzes locales (on parle de bière, qu'il n'y ait pas d'embrouille !). C'est faire le voyage de Clermont-Ferrand, avec CFH une nouvelle fois, pour aller vider un godet avec Scytal, au pied de la statue d'Urbain II. C'est inviter Guy de Latour à la maison, pour tester le jeu de société qu'il avait créé. C'est boire du porto le vendredi soir, dans la chambre de cité universitaire de McLenet, avec Lettucie qui appuie frénétiquement sur F5 pour voir si le tour est passé. C'est me retrouver coincé à Lille après l'heure du dernier train pour Dunkerque, et me faire gentiment héberger chez de Flandres. C'est sortir peinard des toilettes, pour me retrouver coincé entre Miltasil et Nithé, une demi-tête de plus que moi chacun, qui m'attendent pour me demander des comptes (gentiment) sur un retournement d'alliance récent.
Certaines rencontres ont eu une influence profonde et durable sur ma vie, des amitiés solides se sont crées. Guy de Crydée m'a donné de bons conseils, au moment où je doutais beaucoup sur la suite de mes études. Merci Stéphane ! J'ai déjà mentionné Mc et Lettu, on ne s'est pour ainsi dire plus quittés, même en bossant dans trois pays différents, de même qu'avec Uburoy, devenu le parrain d'un de mes enfants. Il y a Vakoran, le chien fou. Papacha-Sama, qui m'a initié au jeu de rôle sur table, me faisant découvrir aussi Lovecraft et Howard, entre autres. Et je ne peux pas ne pas mentionner Amaréthuse. Merci du fond du cœur, Ariane, toi qui m'as présenté celle qui deviendrait mon épouse. Quinze ans et quatre petites princesses plus tard, en partie grâce à G&P donc, comment trouver le temps d'encore jouer à G&P (vous avez reconnu la loi de Lenz) ?
Et G&P bien sûr, c'est Kalan ! qui a tant donné, avec une générosité, une constance dans l'effort, que j'admirais déjà à l'époque, et que j'ai admirées encore plus lorsqu'à mon tour j'ai mesuré ce que c'était qu'avoir des enfants. Cyrille, si tu lis ce message : merci pour tout ce que tu as fait pour la communauté. Tu fais partie des gens qui donnent envie de croire en l'humanité. Merci à ceux qui t'ont épaulé et qui ont pris le relais, et notamment Ilmir et Sagramor. Merci à tous les autres, ceux que j'ai cités, ceux que je n'ai pas cités, ceux avec qui j'ai joué, chatté, bu des bières, ourdi des complots, ceux à qui j'ai joué des tours de cochon, ceux qui m'en ont joué, ceux qui ont essayé de m'en jouer. G&P, mon premier jeu en ligne, et le seul qui m'ait retenu plus de quelques jours : un jeu qui sortait de l'ordinaire, avec des joueurs incroyables. Je ne suis pas près de vous oublier.
Certains d'entre vous connaissent mon amour de la poésie. Je conclus mon aventure G&Pique sur un poème de Sully Prudhomme. Tous aimés, tous beaux, comme les joueurs que j'ai croisés ici.
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Des yeux sans nombre ont vu l’aurore ;
Ils dorment au fond des tombeaux
Et le soleil se lève encore.
Les nuits plus douces que les jours
Ont enchanté des yeux sans nombre ;
Les étoiles brillent toujours
Et les yeux se sont remplis d’ombre.
Oh ! qu’ils aient perdu le regard,
Non, non, cela n’est pas possible !
Ils se sont tournés quelque part
Vers ce qu’on nomme l’invisible ;
Et comme les astres penchants,
Nous quittent, mais au ciel demeurent,
Les prunelles ont leurs couchants,
Mais il n’est pas vrai qu’elles meurent :
Bleus ou noirs, tous aimés, tous beaux,
Ouverts à quelque immense aurore,
De l’autre côté des tombeaux
Les yeux qu’on ferme voient encore.
Je vous aime, les gars (et les garces filles) !
Alz